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Ce mois-ci nous vous proposons un entretien avec un « Vampyr » ! Maintenant que les beaux jours arrivent, il commence à faire chaud, alors pensez à vous hydrater ! Pour vous, cela sera-t-il plutôt une bière bien fraîche ou préféreriez-vous une lampée de sang encore tiède ? N'hésitez pas à venir nous donner vos impressions suite à cette écoute, via le forum ou les réseaux sociaux !
Olivier Derivière est né le 26 décembre 1978. Il a commencé à étudier les percussions à l'âge de cinq ans, puis est entré au Conservatoire de Nice. Dès l'adolescence, il a appris les aspects techniques de l'écriture musicale pour des média interactifs. En 2000, il a gagné une bourse d'études pour le Berklee College of Music de Boston pour y apprendre la composition de musique de films et le jazz. Il a pu ainsi découvrir l'Orchestre symphonique de Boston et d'autres musiciens, compositeurs et chefs d'orchestre de renom. Ses influences pourront paraître plutôt hétéroclites à certains, puisqu'elles vont de compositeurs classiques tels que Dmitri Chostakovitch, à Peter Gabriel et à Aphex Twin. S'il compose des musiques pour quelques courts et longs métrages (La Tartine, Et toi ?), son travail principal reste lié aux jeux vidéo. En effet, il a commencé à composer dans ce domaine en 2004 avec ObsCure, un survival horror, interprété par La Maîtrise des Hauts-de-Seine, le Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris. Pour la suite du jeu, ObsCure 2 : The Aftermath sorti en 2007, Derivière a fait appel au Boston String Quartet. En 2008, il poursuit sur sa lancée avec Alone in the Dark, pour lequel il a écrit des chansons interprétées par le choeur The Mystery of Bulgarian Voices, récompensé aux Grammy Awards. La bande originale de Remember Me, un jeu développé par Dontnod en 2013, a fait beaucoup parler d'elle, avec ses sonorités futuristes et originales, réalisées avec la participation de l'Orchestre Philharmonia. Il a ensuite composé la musique de l'extension Freedom Cry de Assassin's Creed IV : Black Flag, puis Get Even en 2017 (ces deux derniers interprétés par le Brussels Philharmonic). Dans le domaine du RPG, il a composé à plusieurs occasions pour le studio français Spiders, notamment pour Bound By Flame, The Technomancer et maintenant GreedFall (en cours de développement). Plus récemment, on peut aussi entendre son travail dans le jeu d'aventure The Council, et enfin, Vampyr, dont la musique a été principalement interprétée par Eric-Maria Couturier.
Quant à Eric-Maria Couturier, le violoncelliste qui interprète en grande partie de l'OST de Vampyr, il est un membre du réputé Ensemble Intercontemporain. Après des études brillantes au Conservatoire de Paris auprès de Roland Pidoux et de Christian Ivaldi, il s'intéresse en premier lieu à la musique du XXème siècle, mais aussi plus ancienne, ce qui lui vaut de jouer avec de grands artistes du milieu (Lorin Maazel, Pierre Boulez, Maurizio Pollini, etc). Ouvert à tout, il joue des parties d'improvisation avec le chanteur de jazz David Linx ou encore ErikM. L'OST de Vampyr constitue sa première incursion dans le domaine des bandes-son (films ou jeux vidéo).
Assez particulière, l'OST de Vampyr débute par The Struggle, une pièce faisant la part belle au violoncelle, instrument qui dominera la bande-son de bout en bout. Il sera souvent utilisé pour instaurer une atmosphère un peu "malsaine". En effet, le compositeur fait le pari d'utiliser le violoncelle (joué par Eric-Maria Couturier, de l'Ensemble Intercontemporain) comme instrument principal tout au long de l'OST, et cette première musique met en tout cas tout de suite dans le bain. Du reste, l'OST dans son entier proposera plus particulièrement des ambiances, nous entraînant bien loin des mélodies et des accords grandiloquents. Be Born Again est à ce titre un bon exemple, de même que la troisième piste : The Thirst, qui allie une certaine abstraction avec l'apparition d'un deuxième élément majeur de la bande-son, à savoir les voix (interprétées par la chorale Vox Futura). Si on se retrouve tout de suite dans une atmosphère oppressante, les musiques ne sont pas du tout passe-partout et sont même tellement atypiques qu'elles dérangent plus qu'elles ne séduisent au premier abord. Bridge to London pourra d'ailleurs paraître un peu plus classique, en tout cas moins personnelle, mais Blood Trail, avec le retour du violoncelle, fait renaître un certain malaise, souligné par les battements de coeur en arrière plan (on entend d'ailleurs ces derniers dans plusieurs pistes, notamment The Thirst). Les voix "A Capella" de The Cross ne proposent aucun répit, en tension constante. La courte pièce A Friend agit ainsi comme une sorte de détente bienvenue, comme un prélude à New Home, où l'on trouve pour la première fois un peu de repos, où le violoncelle nous montre un autre aspect, plus séducteur et moins tonitruant. Cela sera également le cas dans The Lady, et bien que la pièce soit un peu moins mémorable, le duo avec la flûte reste intéressant. A noter que la flûte est jouée par Emmanuelle Ophèle, également issue de l'Ensemble Intercontemporain. Un retour vers l'ambiance générale de la bande-son s'effectue avec Industrial Landscapes. Utilisant des sons synthétiques, en référence au début de l'ère industrielle, c'est une des rares pistes (avec White Chapel District) s'étirant un peu en longueur. Ce n'est pas le cas de Questions, sorte de grand solo de violoncelle, qui semble débuter normalement, mais dont le discours se désagrège au fur et à mesure pour s'arrêter brutalement. On retrouve un peu la même chose dans les pistes suivantes (Secrets, Making a Vampyr). The Funerals porte également bien son nom, où le violoncelle parvient à se faire à la fois solennel, sombre et mélancolique dans une longue pièce à écouter avec attention jusqu'à la marche funèbre finale. Le côté plus abstrait, voire "contemporain", de la bande-son est mis en exergue plus particulièrement dans Insane Family et Impromptu, où le violoncelle est bien entendu très présent. Rich Neighborhood paraîtra donc beaucoup plus classique (avec un solo de violoncelle particulièrement réussi), mais reste malgré tout dans l'atmosphère général de l'OST. C'est également le cas avec la splendide pièce Do You Fancy Me, constituée d'arpèges montants et descendants, qui signe pour cette fin de bande-son le retour à une certaine sérénité (Another Land) toujours mêlée de nostalgie (What We Could Have Become). Après une première écoute de la bande-son de Vampyr, on ne ressort pas forcément conquis, mais plutôt épuisé et surtout décontenancé. C'est au fur et à mesure des écoutes que l'on est pris presque inévitablement par des musiques qui sortent clairement du lot par leur originalité incontestable, en grande partie due au choix de l'instrument, peu banal. Bien entendu, prise seule, cette bande-son ne plaira sans doute pas à tout le monde, mais il ne faut pas s'arrêter à une première impression pour découvrir les subtilités techniques et artistiques de cette OST qui ne laissera pas indifférent.
J'ai découvert l'OST de Vampyr au sein du jeu, et j'ai remarqué dès les premiers instants à quel point elle était peu commune et pour le moins spéciale, dans le bon comme dans le mauvais sens. Le premier tiers de l'album est particulièrement froid et désagréable à l'écoute (The Struggle, The Thirst), ce qui retranscrit bien l'ambiance du jeu qui se met en place, accompagnée des soucis, des incertitudes du protagoniste, Dr Jonathan Reid, ainsi qu'un profond sentiment de malaise. La suite s'exprime d'un ton plus serein, tout d'abord avec la piste A Friend, suivie par A New Home et The Lady. Ces trois-là représentent les premiers espoirs d'un jeune vampire livré à lui-même, qui se méfie encore de cet univers devenu hostile. On entend dans presque toutes les musiques de Vampyr le violoncelle qui met un accent tout particulier sur l'atmosphère inquiétante, troublante et parfois tragique. Cela dit, les pistes les plus lugubres restent celles accompagnées de voix et de cantiques (The Cross, The Thirst en est l'exemple parfait), mais certaines sont tout simplement dissonantes et mettent le joueur en position d'inconfort (Blood Trail, Making a Vampyr, White Chapel District). La seconde moitié de la bande-son est beaucoup plus mélodieuse (The Funerals, Rich Neighborhoods, A Night at Home et la mélancolique What We Could Have Become). Bien qu'on entende toujours le violoncelle en instrument principal, l'écoute ne m'a pas donné un sentiment de répétitivité, contrairement à ce à quoi je m'attendais. Olivier Derivière a réussi à capter l'attention du joueur, tenir en haleine l'auditeur, mettre la pression là où il faut et la relâcher au bon moment. Mention spéciale à la superbe Do You Fancy Me, empreinte d'une profonde nostalgie.
Voilà une OST atypique, et j'avoue que ma première écoute légère m'a donnée une sensation étrange et pas très encourageante. Il faut dire que les musiques sont sombres, et vraiment différentes des musiques d'OST de jeux qu'on a l'habitude d'entendre. Après, le nom du jeu donne une indication sur le thème, Vampyr, et autant dire qu'après plusieurs écoutes, on découvre bien les atmosphères désirées, et on arrive même à imaginer certains passages. La dernière What We Could Have Become apporte bien une touche de nostalgie, son titre pouvant correspondre à tout un chacun. Pour moi, la part belle revient à la magnifique Do you Fancy Me, on se croirait dans un grand huit d'émotions, qui s'intensifie jusqu'au bout ! Pour résumer, c'est bien simple, à force d'écouter cette OST particulière, elle m'a donné envie de tester le jeu, pour voir l'impact de ces musiques en pleine action, et aura le mérite de rester dans ma mémoire pour sa singularité.
N'oubliez pas que vous pouvez aussi acheter la bande-son via ce lien : https://olivierderiviere.bandcamp.com/album/vampyr ou l'écouter sur Spotify gratuitement. Rédigé par Delldongo, Tennee et Wolfangele le 7 juillet 2018
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