Preview : Edge of Eternity | ||||||||||||
Edge of Eternity est un RPG développé par le studio indépendant français Midgar, et financé à hauteur de 160.000 $ sur Kickstarter. Le projet datant de 2015, l'attente d'un RPG "à la japonaise" créé par des Français s'est petit à petit faite assez grande, d'autant qu'à l'époque de son annonce, une première démo laissait entrevoir de bonnes choses. Au fil du temps, le projet a beaucoup évolué (changement de logo, d'apparence du héros, et même du gameplay), si bien que cet "Accès anticipé" - qui n'est autre qu'une version alpha - n'a que peu de rapports avec la toute première version de démonstration. Au lancement du jeu, un texte assez long s'affiche à l'écran (uniquement en anglais d'ailleurs) pour signaler que Edge of Eternity est la création d'une équipe de 9 personnes. Une mise en garde à l'intention des joueurs, sans doute afin d'y quérir une certaine mansuétude, car les développeurs le disent eux-mêmes : le jeu est encore très loin de leurs attentes ! Néanmoins, si on pourra être indulgent sur certains côtés (notamment techniques) du jeu, il ne faut pas non plus tout excuser aux titres indépendants, sous prétexte qu'ils n'ont pas les moyens des grosses productions. D'une part, il est tout à fait possible de réaliser de bons jeux avec (relativement) peu de moyens (on citera les RPG de Zeboyd, même s'ils s'inscrivent dans une autre optique) ; d'autre part, on pourra plus facilement critiquer les aspects "intellectuels" du jeu. En effet, avoir de l'ambition est une chose, mais atteindre ses objectifs en est une autre. Après plusieurs années de développement, disons-le tout de suite, le constat semble très alarmant pour Edge of Eternity. Même si le jeu n'est censé sortir que d'ici deux bonnes années, et malgré un certain travail effectué, cet accès anticipé laisse pour le moins perplexe. Bien entendu, techniquement, on ne pourra pas vraiment lui reprocher quoi que ce soit, si ce n'est un manque presque total d'optimisation. Depuis le 5 décembre, de très nombreux patchs sont bien venus corriger d'innombrables problèmes graphiques et autres bugs visuels, mais le problème est ailleurs. En effet, la direction artistique est catastrophique, l'univers proposé ne possède aucun charme, tellement il semble avoir été vu et revu tant de fois dans d'autres jeux. A noter que cet accès anticipé permet juste de jouer au premier chapitre du jeu, c'est-à-dire d'avoir accès à la première ville et quelques zones alentours, pour une petite dizaine d'heures de jeu. Ce n'est d'ailleurs pas la carte du monde, très austère et quasiment incompréhensible qui arrange les chose. Certes, Edge of Eternity se propose d'être une "lettre d'amour" aux RPG, mais cela ne devrait pas se faire au détriment d'un univers construit et personnel. Comment, en premier lieu, ne pas être frappé par la transformation du héros, largement "Noctisisé" (oui, Daryon ressemble fortement à Noctis, physiquement). On trouvera d'ailleurs énormément de petits détails repris du dernier opus en date de la série Final Fantasy (mais aussi du XIII), allant même jusqu'à reprendre la police de caractère et les marqueurs de quête … En réalité, beaucoup trop d'éléments sont repris d'autres RPG, faute de les améliorer ou de les personnaliser, ils ne semblent être que le reflet d'une certaine paresse, ou d'un manque d'idée flagrant. On a en effet plus l'impression de se trouver devant un catalogue d'idées reprises tour à tour à Wild Arms, FFXIII ou Xenoblade (les effets météorologiques notamment) que devant un véritable univers construit et homogène. Car, pour ne rien arranger, et mis à part la première minute de jeu, la mise en scène est quasiment inexistante : protagonistes se tournant le dos lors de conversations, personnages inexpressifs au possible et dialogues peu convaincants, souvent dignes d'un collégien. Tout cela n'aide pas vraiment à entrer dans l'univers, qui reprend d'ailleurs le thème des "cristaux" de façon bien naïve et surtout insuffisante. Qu'y a-t-il réellement derrière ce terme ? Le joueur est laissé dans un certain flou. Quant au scénario, il nous propose de suivre l'histoire de Daryon et sa sœur Sélène. Daryon ayant déserté l'armée afin de soigner leur mère mourante, les deux héros se mettent en voyage pour trouver un remède afin de la guérir. Mais là encore, la sauce a bien du mal à prendre, puisqu'on se retrouve sans trop savoir comment dans un lieu inhospitalier, où l'urgence de la situation ne se fait guère ressentir, nos deux comparses s'amusant, lors d'une quête, à cueillir des fleurs dans la plaine. Dans cet accès anticipé, les divers lieux proposés sont assez peu nombreux, on est loin d'avoir du plaisir à explorer des zones assez petites, même s'il est possible d'y ramasser quelques objets (à l'utilité par ailleurs inconnue), voire d'extraire des minerais à l'aide d'une pioche (aucune aide ou tutoriel n'est proposé pour cette fonctionnalité). Quant aux quêtes annexes, qui ont le mérite d'exister, quelques-unes sont disponibles auprès de PNJ (aller ramasser des objets) ou d'un tableau de chasse (pour aller éliminer des monstres) : leur intérêt dans la trame scénaristique est donc quasiment nul. En se baladant un peu, on pourra également tomber sur des "événements proches", où il faudra le plus souvent aller aider des voyageurs aux prises avec des monstres. Côté gameplay, là aussi, on pourra louer le travail effectué, mais pour un résultat encore assez mitigé. En effet, si le système tactique proposé par les combats est intéressant au départ, il se révèle bien vite lassant, obligeant sans cesse à se déplacer sur l'aire de combat, notamment concernant Sélène, dont les magies peuvent être interrompues à la moindre attaque. Le système de combat demeure finalement un tour par tour très classique, mais inutilement compliqué, notamment par une ergonomie des touches qui impose d'appuyer sur la gâchette de la manette pour trouver la simple action "Attaquer". Il est heureusement possible de basculer en mode "classique", mais l'ensemble reste peu agréable à gérer, d'autant que les textes affichés à l'écran sont ridiculement petits et même illisibles sur un écran de télévision. Bien que le jeu soit aussi prévu sur PS4 et Xbox One, mieux vaut pour le moment se contenter d'un écran de PC. La meilleure idée du jeu est sans doute de proposer des niveaux pour chaque arme, ainsi que des sphériers propres à chaque équipement. Même si cela suppose que chaque changement d'épées ou de bâtons nécessite de revoir entièrement son sphérier, l'idée est prometteuse. En effet, il est possible d'insérer des cristaux, afin d'avoir accès à des compétences, que ce soit des sorts ou des bonus passifs. En revanche, il est plus difficile de comprendre pourquoi certains chemins, dans ces sphériers, se trouvent bloqués une fois qu'on a choisi d'aller dans telle ou telle direction. Par ailleurs, les gains de statistiques associés aux cristaux sont assez dérisoires, quand on pense qu'on peut avoir un bonus de +1 en vitesse alors que son personnage a déjà 265 … Il y a donc encore du travail pour rendre le système agréable, gérable et surtout efficace. Le jeu propose également un système de création d'objets, qui permet surtout, dans cet accès anticipé, de créer de nouveaux cristaux en en fusionnant d'autres. Au final, et après quelques heures à errer dans des zones couloirs, on en viendrait presque à regretter la première démo du jeu, qui possédait son propre charme, un design légèrement épuré assez agréable, ainsi qu'un gameplay prometteur. En voulant se rapprocher de titres connus et à succès, Edge of Eternity prend un peu le parti du clinquant superficiel, au détriment d'un véritable contenu accrocheur. Bien entendu, on ne parle ici que d'un jeu en accès anticipé (au prix objectivement assez élevé de 19,99 €), mais il faut reconnaître que sa pertinence est loin d'être évidente. Si les backers du jeu lui trouveront facilement des circonstances atténuantes, il n'est pas certain que le titre ait vraiment gagné à montrer un contenu aussi pauvre et rempli de bugs en tout genre. On attendra donc la sortie du jeu (pour 2020 en théorie) pour se forger une opinion sur ce titre. Rédigé par Delldongo, le 09 janvier 2019
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