Preview : The First Berserker : Khazan

S’il y a bien un genre de jeu qu’il n’est plus nécessaire de présenter de nos jours, c'est bien celui des souls-like. Depuis le succès fulgurant des jeux de Fromsoftware (et plus particulièrement Darks Souls 3), les « action-RPG Hardcore » se sont répandus comme une traînée de poudre, et la formule a été déclinée sous d’innombrables formes. Mais parmi les jeux qui s’en inspirent, depuis ceux qui reproduisent la formule le plus fidèlement possible jusqu’à ceux qui n’en répètent que quelques éléments, rares sont les œuvres qui ont réussi à transcender leur modèle pour offrir une expérience qui se rapproche de la qualité de leur inspiration originelle.

The First Berserker : Khazan, développé par le studio coréen Neople, revendique haut et fort appartenir au genre sus-cité des « action-RPG Hardcore ». Sa démo étant disponible, essayons de voir si ce qu’elle propose préfigure un futur jeu capable de se démarquer suffisamment de ses illustres ancêtres pour marquer les esprits, ou simplement un énième souls-like de plus.

Un mot sur la Démo

Tout d'abord, petite mise au point concernant la/les versions de test. La démo sortie en janvier 2025 est une version plus courte et retravaillée de la version CBT (closed beta test) qui a eu lieu en octobre 2024. Les deux versions sont significativement différentes et il convient d'en parler dès maintenant, car même si la preview se base sur la version disponible actuellement, il arrivera qu’elle soit comparée à celle de la CBT sur certains points.
Pour schématiser, gardez en tête que la démo actuelle est plus courte : elle ne contient que les 2 premiers chapitres, contre 3 pour la CBT et ne propose pas l'accès au Hub. Elle est aussi bien plus simple, même en niveau de difficulté normal. Le reste tient majoritairement d’ajustements techniques et de modifications de gameplay mineures.


C’est (encore) une sombre histoire de vengeance, mais c'est quand même beau.

L’histoire de The First Berserker : Khazan prend place dans l’univers de la série Dungeon Fighter Online, des jeux très connus et joués en Corée, mais bien plus confidentiels en Occident.
On y découvre un Khazan, grand général de l’empire de Pell Los, enfermé dans la cage d’un convoi qui l’amène vers son lieu d'exil : une montagne enneigée. Trahis par ceux-là même qu’il a protégé, mutilé et affaibli, il ne doit son sauvetage qu'à une avalanche, un « coup du destin » orchestré par le mystérieux spectre des lames qui libère notre héros et se lie à lui, entamant ainsi l'histoire du jeu.

La démo n'entrant pas vraiment dans les détails en ce qui concerne le scénario (il ne s’agit que du début du jeu), il ne semble pas pertinent d’en juger la teneur, même si l'accroche est plutôt efficace bien que classique. On peut cependant noter l’ambiance assez sombre qui se dégage d’emblée du jeu, tant visuellement que dans la narration. Khazan est mutilé, recouvert de sang, désespéré, il ne doit son salut qu'à l'intervention d'un être mystique, véritable amalgame d'âmes damnées qui cherche à prendre possession de son corps. Le ton est donné, et la dark fantasy dans toute sa lugubre beauté semble être la note choisie.

Pour rester sur l'aspect narration, la mise en scène est plutôt réussie tant en combat que pendant les scènes de dialogues, qui sont toutes doublées (en anglais ou en japonais). Les animations sont réussies et les personnages comme les monstres profitent du cell-shading de toute beauté que propose le jeu pour mettre en avant leurs design plutôt classe. Petit bémol concernant les musiques du jeu qui sont malheureusement au mieux fonctionnelles, au pire totalement oubliables. Seul le thème du second boss arrive un peu à tirer son épingle du jeu.

Cela dit, même si le jeu est beau et profite d'une direction artistique réussie, la démo ne nous fait explorer que deux environnements : une montagne enneigée et une forêt… enneigée, ce qui, en plus d‘être monotone, ne nous permet pas de nous faire de véritable avis sur ce que proposera l’aventure dans son ensemble.
La CBT d'octobre proposait quant à elle un troisième biome qui, lui, n'était pas neigeux, mais qui peinait à susciter toute autre forme d’émoi, troquant les extérieurs blancs de la montagne aux intérieurs gris/noir d'un temple ancien.

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Comme dit, ça ne respire pas la gaieté.
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Notre héros en bien mauvaise posture, le ton est donné
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Là, il va un peu mieux, mais toujours pas la grande forme

Habile transition pour parler de level design

Si le design visuel des zones ne pousse pas à l'émerveillement constant, force est de constater que ces dernières n'arrivent pas non plus à se démarquer en termes de construction, et à proposer quelque chose qui sorte du « couloir à bagarre ».
S'il y a bien un point où Khazan, comme beaucoup d’autres avant lui, est loin d'égaler la maestria des jeux de From Software, c'est bien le design de ses niveaux. Loin, très loin sont les majestueux édifices labyrinthiques de ses modèles. Ici, il faudra malheureusement se contenter de couloirs reliant deux combats, avec un détour vers un coffre ou un raccourci de temps en temps.
Les niveaux se contentent du minimum syndical dans cette démo, et bien qu’ils proposent de jolis panoramas çà et là, manette en mains, il s’agit souvent d’aller d’un point A à un point B en tuant des trucs sur le passage, ce qui est bien dommage.

Le jeu ayant le bon goût de remplir son contrat à défaut d’être créatif, on pourra cependant noter en point positif l’emplacement des différents points de sauvegarde (juste avant un boss, ou après une section assez longue…). Des choix souvent judicieux qui permettent la plupart du temps de rythmer l'exploration et d’éviter la frustration inhérente à la mort dans ce genre de jeux.

En somme, le level design est très scolaire, et sacrifie l’innovation et la découverte au profit de l'efficacité et du rythme. Espérons que la version finale fera preuve de plus d’ambition à ce niveau-là et saura trouver un juste équilibre.

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Un des exemples de bifurcations, on en croisera beaucoup des commes ça
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Le jeu peut quand même proposer de belles choses
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La mise en scène est réussie

Et maintenant, la bagarre

Vu que l’aspect exploration du titre est réduit à peau de chagrin dans cette démo, le combat, lui, arrive-t-il à tirer son épingle du jeu ?
Sur le papier, le titre du studio Neople ne semble pas réinventer la roue et va même piocher allègrement quelques idées à droite et à gauche. Outre le sempiternel trio attaques rapides/attaques lourdes/techniques, on retrouve des mécaniques de parade parfaites et de postures qui ne sont pas sans rappeler Sekiro ; une mécanique d'esquive parfaite plus coutumière des beat'em all style Bayonetta ; la gestion des statistiques d'un souls… The First Berserker : Khazan arbore fièrement ses nombreuses références sans rougir. Mais là où la surprise se crée, c'est quand cet amalgame de mécanismes que l'on pourrait croire indigeste et dépareillé parvient, manette en mains, à rendre le jeu incroyablement plaisant et furieusement satisfaisant.

L'assemblage de ces mécanismes donne en effet naissance à un système de combat viscéral et tout dans l’agression, dont la fureur est sublimée par un travail sur les feedbacks visuels et sonores exemplaires. Cet amalgame permet aussi un système de combat bien plus technique et plus touffu qu'il n'y paraît, chaque aspect pouvant fonctionner ensemble ou séparément pour donner une expérience tout d'abord adaptative, mais aussi entièrement personnalisable.
Et cette personnalisation peut être poussée encore plus loin grâce aux arbres de compétences.

Dans la démo, nous avions accès à trois armes. Une grande épée pour des attaques lentes mais puissantes, infligeant davantage de dégâts de posture ; une lance plus rapide, ayant plus de portée et jouant plus sur le positionnement ; et enfin une paire épée courte/hache pour un mélange entre vitesse et force.
En utilisant l'une de ces armes, on obtient des points de compétences à dépenser dans un arbre qui lui est propre. Cela permet ainsi de moduler le gameplay avec pas mal de profondeur.
Il est par exemple possible de rajouter des attaques entre certains coups d’un combo pré-existant, d’orienter une arme vers la parade parfaite ou vers l’esquive parfaite, de modifier certaines séquences de coups en restant appuyé sur les touches ou en réalisant des enchaînements spécifiques… La personnalisation est assez poussée et les modifications sont plus que de simples augmentations de chiffres. Les combos sont modifiés visuellement, mais aussi structurellement et chaque arme permet un style de jeu vraiment différent. Petit plus, dans la démo, il était possible à tout moment et gratuitement de ré-attribuer ces points comme bon nous semble, permettant de tester toutes les armes et tous les styles de jeu à l’envi. Espérons que cette fonctionnalité reste dans le jeu de base.

En définitive, le système de combat de Khazan n'est pas très original, mais il est diablement bien maîtrisé. Très conventionnel dans sa structure, il parvient néanmoins à se démarquer grâce à une modularisation poussée et à un travail sur l'habillage exemplaire.

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L’interface du jeu, et les différentes jauges à surveiller
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Cet ennemi un peu plus costaud fait office d'entraînement au boss
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Dans ce combat, gérer son endurance est primordial

Parce qu’il y a RPG dans « Action RPG hardcore »

Sur le plan du développement du personnage principal, le jeu suit presque à la lettre les poncifs du genre. On obtient des « Lacrima » (l’équivalent de l’expérience), en abattant des ennemis ou en ouvrant des coffres, que l'on peut par la suite dépenser aux différents points de sauvegarde pour obtenir des points à répartir entre différentes statistiques : force, endurance, dextérité, chance…
Ces statistiques influent directement sur les performances de notre avatar, lui permettant d'infliger plus de dégâts, de mieux encaisser, de posséder plus de PV, ou de mieux manier certaines armes…

En ce qui concerne l’équipement, le jeu choisit la voie du butin, permettant d’obtenir armures et armes en abattant des ennemis ou en ouvrant des coffres (parfois à outrance). Ces équipements peuvent être de différentes couleurs, indiquant leur rareté (et donc puissance), possèdent des statistiques et des passifs aléatoires, et peuvent faire partie d'ensemble qui permettent de déclencher des capacités passives bonus.

Bref, c’est efficace, mais éprouvé et du coup très classique, et les lacunes demeurent. Les amateurs y trouveront leurs marques, mais pourront aussi regretter un manque d’audace, là où les néophytes trouveront un système de statistiques manquant de clarté quant à la prévisualisation des conséquences de nos choix d’évolution.

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Toute l'évolution du personnage peut se faire depuis ce point de sauvegarde
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Les amateurs du genre sont vraiment en terrain connu
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Les différents arbres de compétences

Quid de la difficulté, justement ?

N’y allons pas par quatre chemins, le jeu est dur, moins que lors de la CBT, mais il demeure exigeant. Certes, l’appréciation de la difficulté est subjective, mais il reste un jeu difficile, pensé comme tel. Le soft se revendique « hardcore » et ça se ressent manettes en mains. Les timings d’esquive et de parade sont serrés, les ennemis sont agressifs, la gestion de l’endurance est primordiale… Khazan est un jeu qui demandera un investissement certain, encore plus aux joueurs les moins adeptes de ce genre de jeu. Mais là où le titre réussit, c’est qu’il n’est que très rarement (en tout cas dans cette version de la démo) frustrant. Beaucoup de systèmes et d’idées de design ont été mis en place pour faire en sorte que la mort ne soit pas due à un jeu injuste, mais à des erreurs du joueur, et qu’elle ne soit pas trop punitive.
Comme dit plus haut, il y aura systématiquement un point de sauvegarde non loin du boss du niveau permettant de reprendre l’affrontement rapidement ; de plus les lacrima seront déposées à l’entrée de l’arène de combat, évitant de les perdre suite à plusieurs défaites consécutives. À ce sujet, il sera possible durant les combats de boss d’effectuer certaines actions qui permettront de gagner un petit bonus de lacrima, que l’on conservera, triomphe ou non : dans le premier affrontement, il s’agit par exemple de casser les piques de glace sur le dos du monstre. Ce qui permettra de progresser sans avoir à parcourir le niveau en arrière en quête d’expérience. Les ennemis auront aussi le bon goût de nous préparer à l'affrontement contre le boss en introduisant notamment certains comportements que l’on retrouvera plus tard contre le grand méchant, préparant nos réflexes ou notre mémoire musculaire.
L'expérience reste ainsi très exigeante, mais moins frustrante, car moins punitive.
Mais de fait, le jeu ne s'adresse tout de même pas à tout le monde. On saluera néanmoins la démarche de proposer un mode facile pour ceux voulant malgré tout tenter l'expérience en essayant de limiter la casse.

Conclusion

The First Berserker : Khazan part sur de très bonnes bases. Le jeu semble s'annoncer comme un titre qui, s'il n'est pas révolutionnaire, maîtrise parfaitement son sujet et est capable de le réciter en changeant suffisamment de mots ici et là pour ne pas se faire attraper en flagrant délit de copiage. Toutes similitudes avec d'autres jeux ne sauraient pas être fortuites, mais ce qui est important, c'est qu'elles ne desservent pas le soft en l’alourdissant de mécaniques superflues, voire carrément antithétiques. Le jeu s'approprie de manière maîtrisée des pans entiers de design différents et les mélange avec une grande dextérité, donnant naissance à un cocktail bien plus homogène qu'on ne pourrait le croire. Ajoutez à cela une présentation vraiment solide (sauf au niveau de la musique) et un ressenti manette en mains extrêmement satisfaisant et vous obtenez la formule d'un jeu très prometteur.
The First Berserker : Khazan ne changera peut-être pas la face du monde des souls-like, la faute à quelques petits écueils comme une musique en retrait et un level design peu inspiré, mais ce n'est pas vraiment un problème. Si le jeu arrive à maintenir (ou à surpasser) ce niveau de controle et de qualité sur toute sa durée, alors il sera une excellente proposition dans le paysage des action-RPG hardcore.

Fiche complète de ce jeu

Rédigé par Memoircosmos le 16/03/2025

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